Ces dernières semaines j’ai eu l’occasion d’échanger avec plusieurs actrices du numériques ivoriennes. Après Eléonore Koffi, présidente des AmazoOn du Web, je suis contente de vous faire découvrir Manuela Kouadio engagée dans la communauté informatique et l’open source auprès des femmes via l’initiative WoMoz.

Après des études en informatique et infographie 3D, Manuela s’est lancé comme défi de monter sa boîte : passionnée par tout ce qui touche à l’IT, la mode et culture africaine, elle dirige depuis Mars 2015 une entreprise spécialisée dans la modélisation architecturale et le design, alliant ainsi plusieurs de ses passions.

Mon cousin a été pour moi un vrai modèle parce qu’il a suscité en moi le désir de devenir une informaticienne

Le milieu de l’informatique en Côte d’Ivoire est comme en France très masculin. Pourquoi avoir choisi de faire des études en informatique et des nouvelles technologies ?

Tout a commencé en classe de seconde : l’école avait initié un cours en informatique que j’aimais plutôt bien et je m’en sortais avec de très bonnes notes ☺.

Et lorsque j’étais en classe de terminale, mon cousin a eu comme cadeau de notre oncle un ordinateur portable. C’est donc avec l’ordinateur de ce cousin que j’ai commencé à me familiariser avec les différents logiciels, jusqu’à m’accaparer totalement son ordinateur !

Après mon baccalauréat série D, mon père m’a proposé de prendre des cours d’économie en ligne avec des écoles européennes afin de mieux gérer mon temps et m’occuper de mes activités. Chose que j’ai refusé car je voulais aller dans la même école d’informatique que celle de mon cousin.

Puis lors des orientations en BTS, je me suis inscrite dans une filière en informatique et quelques semaines plus tard, j’ai été reçue dans l’école de mon cousin.

Au final je dirais que mon cousin a été pour moi un vrai modèle parce qu’il a suscité en moi le désir de devenir une informaticienne. Aussi, le fait que peu de femmes étaient inscrites dans cette filière m’a tout autant motivée.

 

esprit de force

 

Ce choix a-t-il été facile ?

Lors de ma première année de BTS, tout allait bien même si j’aurai aimé avoir plus de cours de programmation et pratiquer plus de langages de programmation différents.

A la fin de l’année quand mon père m’a demandé comment s’était passée mon année scolaire, je lui répondis que j’étais un peu déçue concernant les cours de programmation. Il m’a donc offert quatre mois de formation intensif dans un cabinet de programmation où j’ai vraiment appris et compris le but de ma formation.

J’ai rencontrée quelques difficultés avec ma mère car elle n’a pas vraiment accepté mon choix jusqu’à ce que je sois admissible en BTS. Elle voulait que je devienne médecin comme les enfants des autres et peut-être aussi parce que c’est ce qu’elle aurait voulu exercer comme profession.

Womoz prône l’alphabétisation numérique des femmes et des jeunes filles ivoiriennes

Tu diriges aujourd’hui le programme WoMoz en Côte d’Ivoire. Quelle est sa mission et ses ambitions ?

Le WoMoz en côte d’ivoire a pour but :

  • d’aider et de soutenir des idées de startup au féminin
  • faire la promotion des femmes qui travaillent dans l’IT ou utilisent les nouvelles technologies dans leur domaine d’activité
  • former une génération de femmes dans le domaine de l’open-source et en particulier aux technologies Mozilla

A Mozilla on a l’habitude de dire que les analphabètes de demain seront ceux qui n’auront pas appris le web !

C’est en ce sens que, cette initiative prône l’alphabétisation numérique des femmes et des jeunes filles ivoiriennes, ainsi que leurs participations sur des projets open-source de Mozilla.

 

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Nous avons aussi besoin de leaders, tout sexe confondus, qui seront des créateurs de ressources pour la future génération

Pourquoi t’être investie dans ce programme ?

L’idée première est venue de Bacely Yorobi qui a posé les fondements. En 2012, il m’a proposé de faire partie des membres fondateurs de la communauté Mozilla qu’il souhaitait implanter en Côte d’Ivoire. Il m’a donc suggéré de développer mes contributions autour de ce programme. Chemin faisant, j’ai essayé de me documenter sur le programme et c’est ainsi que je suis rentrée en contact avec Delphine Lébédel sur IRC qui au départ était à charge du projet WoMoz. Elle m’a ensuite redirigée vers Flore Allemandou qui avait été récemment nommée à la tête du programme WoMoz.

Personnellement, je me suis investie comme bénévole dans ce programme parce que je voulais apporter des solutions aux réalités des étudiants et répondre à de nombreux besoins.

En effet, nous étions nombreux dans les classes et les professeurs ne pouvaient pas cibler véritablement les lacunes personnelles. De ce fait, il fallait apporter aux étudiants, une formation en appui à celle reçue pendant ces deux années de BTS.

Je me suis autant impliquée parce que je pense qu’il serait nécessaire d’avoir une solution qui permettrait à tout étudiant riche ou pauvre, de pouvoir se former, s’informer sur les différentes opportunités qui se créent à travers le Web, partager leurs connaissances avec d’autres étudiants du monde entier et bien plus encore… Mais aussi, une solution qui permettrait de construire des citoyens qui développeront  des idées novatrices pour le bien de leur famille, leur communauté, leur pays, leur continent et le monde entier.

Un autre besoin serait la création d’un cadre favorable au développement d’une Silicon-Valley ivoirienne, avec pourquoi pas une majorité de femmes ?

Puis nous avons aussi besoin de leaders, tout sexe confondus, qui seront des créateurs de ressources pour la future génération.

Enfin j’aimerai voir des citoyens avec une nouvelle mentalité qui s’investiraient et contribueraient au développement de leur pays plutôt que des citoyens qui attendent d’être insérés socialement.

 

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Quelle est la place de l’open-source en Côte d’Ivoire ?

L’Open source occupe une place importante en Côte d’Ivoire. Notons la présence par exemple de SMILE, le 1er Intégrateur européen de solutions open source en côte d’ivoire.

En Côte d’Ivoire, des communautés qui font la promotion de l’open source naissent : je peux citer la communauté Wikipedia Wikimedia de côte d’Ivoire ou encore la communauté Mozilla Côte d’Ivoire qui fait la promotion de l’open web.

Du côté des blogueurs ivoiriens qui militent pour l’open source, certains sont aujourd’hui très influents : Florent Youzan ou Wilfried N’guessan, auteur de “54 raisons que l’Afrique choisisse le logiciel libre“.

Le problème majeur auquel les start-up ivoiriennes doivent faire face est principalement le manque de moyens financiers

Quel est le regard sur le numérique en côte d’Ivoire ? L’informatique ? Start-up ? Quels sont  les difficultés auxquelles vous devez faire face, et les défis que vous devez relever ?

En Côte d’Ivoire plus d’un tiers de la population est connectée à Internet, et un grand nombre est connecté via un téléphone mobile. Les ivoiriens sont très présent sur les réseaux sociaux, et il y a aussi une forte communauté Web menée par des leaders ultra connectés.

Aussi, le numérique occupe une place importante dans le programme du gouvernement, qui se traduit à travers l’opération «  un ivoirien un ordinateur et une connexion » lancée par l’ansut, une agence mise en place par l’État de Côte d’Ivoire.

Coté start-up, même si nous n’avons pas le même niveau de croissance qu’au Kenya ou au Nigeria, j’ai foi en l’émergence de champions ivoiriens, avec des projets prometteurs. Je pense à «  Moh Ni bâh » de Khan Jean Delmas EHUI, socialspot de Bacely YoroBi, intelgeo de régis BAMBA, Alldeny de Jean Patrick Ehouman et bien d’autres…

Le problème majeur auquel les start-up ivoiriennes doivent faire face est principalement le manque de moyens financiers et le manque de suivi dans l’accompagnement du processus de développement.

Tu es en train de monter ta boîte. Quels sont les challenges auxquels tu dois faire face ?

Les challenges auxquels je dois faire face sont principalement les moyens financiers.

J’ai appris à partir de rien et à fonctionner sous fond propre mais je dirais que ce n’est pas forcement la meilleure chose à faire car on se sent parfois limité et dans ces cas-là on n’est pas forcement productive.

Ensuite, un autre challenge c’est apprendre à devenir un bon chef d’entreprise et réussir en affaire. Et le dernier : faire face à l’opinion des proches qui estiment, qu’il serait judicieux de travailler dans une entreprise, avoir de l’expérience avant de me lancer dans cette entreprise.

 

Un grand merci à Manuela !

5 thoughts on “Manuela Kouadio, entrepreneuse et engagée dans l’initiative WoMoz en Côte d’Ivoire

  1. Nous remercions encore le ciel de nous avoir donné une fille comme Manuella, belle et passionnée des TICs, et surtout pour le grand travail abattu avec le programme Womoz. C’est le symbole de la gente féminine en action qui prend ses responsabilités dans un monde de IT déjà dominé par les hommes. Beaucoup de courage à toi et ne t’arrête surtout pas car certaines t’ont déjà pris en exemple.

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  2. Merci infiniment Hoba pour ce joli message d’encouragement… Je ne pourrait m’arrêter… C’est la mission de mozilla qui m’inspire et guide mes idées… Mozilla a fait de moi ce que je suis… Tant que la mission existe… Je ferais de grandes choses pour ma communauté… Merci de croire en moi et que Dieu guide mes pas!

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  3. Merci Manuela pour ces efforts qui pour visent à valoriser le genre. Je suis benevol chez mozilla sur le volet localisation de firfox en langue locale et j’ai dejà participé à deux ateliers de formation au Mali. Je suis ivoirien resident à Abidjan,mais inscrit dans la communauté mozilla malienne. Je souhaite te rencontrer pour voir les opportunités d’une entreprise de localisation de firefox en langue locale ivoirienne.merci
    07 77 17 98

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